Jean-Philippe Kempf – Le chemin des points de suspension

Le blog qui suit est le premier à avoir été fait sans d’abord avoir rencontré l’artiste. Le Covid en est la cause, un Covid long qui m’a empêché de prendre rendez-vous avec lui. Alors nous nous sommes mis d’accord, en attendant de se voir, pour communiquer par voie épistolaire.

J’ai découvert les Encres de Jean-Philippe Kempf un peu par hasard en rédigeant le blog de Karin Dilthey. A un certain moment elle m’a montré le livre de son mari « Les Nuances, transcender le réel » datant de 2021 et qui contenait une belle série d’Encres qui m’ont immédiatement frappé et intrigué.  Le couple habite Comps et nous étions convenus avec Karin que je monterais un jour chez eux pour faire connaissance avec lui… et puis le temps est passé. Mais l’idée d’un blog est restée et je suis heureux qu’elle puisse aujourd’hui se réaliser, même sous une forme inhabituelle.

Ci-dessous donc des extraits de ma correspondance par mail avec Jean-Philippe Kempf.

Souspierre 22.01.24

Bonjour Jean-Philippe Kempf,

…  » Nous ne nous connaissons pas encore mais j’ai compris que vous seriez peut-être d’accord pour que nous fassions ensemble un blog sur vos belles Encres comme je l’ai déjà fait pour les photographies de votre épouse Karin Dilthey…

… Il comprendrait votre parcours en tant qu’artiste et comment vous en êtes venu à faire des Encres plutôt qu’une autre forme de peinture : aquarelle, huile, acrylique. Quels sont les peintres qui vous inspirent et plus généralement quelles sont pour vous les raisons de pratiquer une activité créatrice ? Envoyez-moi éventuellement des réflexions qui vous viennent, sinon j’espère bientôt être débarrassé de mon virus et nous pourrons discuter de vive voix…  »

Laurent Félix-Faure

Comps, 22.01.2024

« L’idée de l’objet d’art naît d’un deuil, d’un manque. Il n‘est en art qu’une chose qui vaille disait Braque : « celle qu’on ne peut expliquer. » C’est dans cet état d’esprit que je réalise mes Encres. Leur genèse naît du besoin de mon œil de traverser la cécité d’un monde. Mon esprit a un besoin de cette sorte d’étrange distraction. Quand nous nous verrons, je vous parlerai de mon parcours, l’historique des Encres après la peinture acrylique, peintures abandonnées. Je vous dirai les peintres qui m’accompagnent. Et s’il est des raisons de pratiquer une activité créatrice, au moins une, c’est accéder à la dimension imaginaire et comme le disait Mallarmé dans une impérieuse nécessité :  » Tu manifesteras par ton œuvre que tu tiens l’univers à distance.  » Et par là même, se plonger dans un baume qui atténue ce deuil originel.

Jean-Philippe Kempf

Souspierre, 23.01.2024

… « Je reviens sur les pensées contenues dans votre mail du 22 janvier. Je les partage jusqu’à un certain point, surtout celle exprimée par Braque. La citation de Mallarmé que vous évoquez part d’un manque, d’un deuil, d’un monde imparfait que seul peut combler l’imaginaire. Donc, si je vous suis, l’art serait pour vous une compensation et une forme de consolation. J’ai tendance à penser que pour moi au contraire, tout en étant conscient des horreurs que nous réserve souvent le monde dans lequel nous vivons, la vie me suffit et l’art est une valeur ajoutée. Lorsque je suis fortement ému par une œuvre d’art (très rarement par les miennes) je vais jusqu’à éprouver des instants d’euphorie, mais j’en conviens avec vous, c’est une « étrange distraction… »

… « J’ai retenu, en lisant votre mail, que vous aviez, avant de vous consacrer aux Encres, abandonné la peinture à l’acrylique. Pourquoi avoir opté pour une technique quasi monochrome, fluide et transparente ? Depuis quand pratiquez vous les Encres ? J’ai cru comprendre que vous aimiez la poésie et que vous en écriviez. Ne fait-on pas parfois la comparaison entre la peinture à l’huile (opaque, chez vous l’acrylique) et l’aquarelle (transparente, chez vous les Encres) qu’entre la prose et la poésie ?… »

LF-F

Comps, 24.01.2024

Mon parcours

« Je suis psychanalyste, auteur et peintre. Une passion pour le théâtre, les beaux-arts, la littérature et l’écriture. »

Ancien travail à l’acrylique de Jean-Philippe Kempf

Les Encres

« En regardant les peintres abstraits, tels Helen Frankenthaler, Gao Xingjian, j’apprenais à voir au-delà de la splendeur de la figuration dont j’admirais la sensualité de la pulpe de chair qui pouvait me plonger dans des émotions éperdues. Et en m’approchant de certains détails, mon œil sentait que l’échelle s’inversait et qu’une abstraction alors s’isolait dans un fragment d’abstraction pure et je découvrais la monumentalité d’une tout autre présence, celle cette fois aérienne, délivrée de toute figuration pour faire place à l’harmonie du rythme. »

Pourquoi les Encres plutôt qu’une autre technique ?

« Au fil du temps, après la peinture acrylique abandonnée, les glacis mêlés subtilement à l’encre de Chine, en un éclair me donnaient à voir la subtile volupté d’un moment de sensibilité en suspens obtenu par une incroyable alchimie accoucheuse d’un instant de grâce. »

Les peintres qui m’inspirent

« Après les grands peintres de la figuration jusqu’à, comme Edward Hopper, ceux qui ont signé un pacte d’abandon de toute conceptualité au profit d’une gestuelle où seul l’acte de peindre compte dans un corps-à-corps inspiré avec la couleur. Je mentionnerai ici, Sam Francis, Morris Louis, Helen Frankenthaler. La liste est longue. »

Pourquoi pratiquer une activité créatrice

« Comme le dit Gilles Deleuze :  » ll y a une affinité fondamentale entre l’œuvre d’art et l’acte de résistance.  »

J-PK

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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